La nomination de Sidy Souleymane Ndiaye au poste de procureur général près la Cour Suprême par le général Mamady Doumbouya soulève de sérieuses interrogations. À deux mois d’une élection présidentielle cruciale, confier une telle responsabilité à un homme au passé controversé interroge sur les véritables intentions du pouvoir. 

Cette fonction, stratégique dans la représentation du ministère public, exige impartialité et intégrité — non pas des fidélités opaques ni des calculs politiques.

Le timing et le profil du nommé laissent planer un doute lourd : s’agit-il encore de justice, ou déjà d’un verrouillage institutionnel ?

Sous le régime déchu d’Alpha Condé, Sidy Souleymane Ndiaye, alors procureur de la République près le tribunal de première instance de Dixinn, s’est illustré comme un acteur central de la répression judiciaire contre les activistes du FNDC.

Personnage clivant, il est directement lié aux poursuites engagées contre ceux qui s’opposaient au troisième mandat.

Un audio, largement diffusé sur les réseaux sociaux, révélait sa voix évoquant sans détour la possibilité de fabriquer des chefs d’accusation pour neutraliser les opposants. Une dérive grave, symptomatique d’un appareil judiciaire instrumentalisé pour servir les intérêts d’un pouvoir autoritaire.

Après la prise de pouvoir par les forces spéciales le 5 septembre 2021, le procureur est apparu face caméra, reconnaissant les faits avec une gêne à peine dissimulée.

Comme une tentative d’excuse, il a évoqué les pressions intenses exercées par le régime d’Alpha Condé, auxquelles il aurait cédé — non pas pour rendre justice, mais pour fabriquer la misère des opposants.

Une confession tardive, qui révèle moins un remords qu’un système où la justice était un outil de persécution, et le magistrat, un rouage docile de la répression.

Cette nomination, en totale contradiction avec les promesses de rupture et de non-recyclage, sonne comme une trahison politique. Elle vient briser les espoirs des Guinéens qui attendaient, avec ferveur, l’avènement d’une justice indépendante — cette justice proclamée comme la boussole du changement.

Au lieu d’un renouveau, c’est le retour des figures du passé, et avec elles, le spectre des compromissions.

Mamadou BARRY III